Ammassalik 1967 : premier contact avec l’Arctique
Galerie couleur
1967, c’est ma première mission en terrain arctique, mon premier contact avec le Groenland. J’avais choisi d’aborder la région par cargo en partant de Copenhague, pour une approche lente. Il s’agissait du premier cargo de l’année. Un moment toujours très important et émouvant pour la population locale bloquée pendant 8 à 9 mois par an par une très large banquise empêchant l’accès à la côte. La population manquait de nombreux produits, car seuls les approvisionnements par avion étaient possibles avec, à cette époque, une liaison mensuelle seulement.
L’objectif de cette première mission était d’observer et de recueillir des informations sur le développement de la population et d’évaluer son ouverture sur l’extérieur (fin d’un isolat ?). Elle était déjà étudiée par Robert Gessain, directeur du musée de l’Homme, qui m’avait accueillie dans son équipe. Elle avait commencé à s’ouvrir sur le monde occidental après la Seconde Guerre Mondiale puis plus intensément à partir des années 60. Les jeunes commençaient à être envoyés au Danemark pour poursuivre leurs études ; la population disposait d’un habitat plus moderne, développait la pêche morutière commerciale et toutes sortes d’activités dans les administrations et dans le domaine de la construction. Néanmoins, la chasse au phoque restait l’activité principale.
Pour découvrir la population, il me fallait tout d’abord apprendre la langue. Un apprentissage difficile car il s’agit d’un dialecte local oral de la langue eskimo/inuit, une langue agglutinante (polysynthétique), qui procède par assemblage d’éléments basiques. En fait, j’ai commencé par apprendre le danois pour pouvoir communiquer avec ceux qui le parlaient et m’initier grâce à eux à leur propre langue.
Je devais aussi me faire connaître de la population. Elle était alors habituellement regroupée dans 9 localités permanentes, mais j’arrivais en période estivale, pendant laquelle tous se déplacent abondamment à la recherche des ressources locales, dans des endroits parfois très isolés. Ma démarche a été alors de bouger avec eux, à la chasse, à la pêche, dans leurs campements d’été et jusque vers un lieu de migration lointaine, pour noter quelles étaient leurs activités, les échanges entre eux. Au-delà de l’accueil très chaleureux que je rencontrais, c’était extraordinairement instructif, passionnant.
Localités visitées pendant la mission :
- Ammassalik (ou Angmagssalik) et Itimiin, Tasida, aujourd’hui Tasiilaq, municipalité de Sermersooq
- Kumiut (ou Kuummiut), aujourd’hui Kuummiit
- Kap Dan (ou Kulusuk), aujourd’hui Kulusuk, et les campements sur les ilots alentour
- Sermiligak, aujourd’hui Sermiligaaq
- Tiderida (ou Tileqilaq ou Tiniteqilaq), aujourd’hui Tiilerilaaq
- Isertok (ou Isortok), aujourd’hui Isertoq
- Ikatek (ou Ikateq),Ikkatteq,village abandonné à Ammassalik
- Qernertevartivit (ou Qarnertevartivit), village abandonné à Ammassalik
- Pikiti (ou Pikiiti), puis Pikiitsi, localité abandonnée au sud d’Ammassalik
- Umivik (ou Umiivik), localité abandonnée au sud d’Ammassalik
- Manginertserpik (ou Mannginnerseerpik), campement sur l’ile d’Ammassalik
Galerie en noir et blanc de la mission Ammassalik 67 : premier contact avec l’Arctique
A écouter et regarder :
Localisation
Ammassalik, Sermersooq, Groenland
Joëlle Robert-Lamblin
Joëlle Robert-Lamblin, anthropologue, Docteur d'Etat ès Lettres et Directeur de recherche honoraire au CNRS, a fait ses études à Paris dans les domaines de la sociologie et du droit. Au début des années soixante, de l'enseignement de l’ethnologie dispensé au Musée de l'...
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