J55 – Une route de glace en guise de pont

mardi 18 mars 2008

L’impression que le temps s’est figé. Que je suis ici, à Salekhard, depuis des semaines. Et pourtant, ce mardi n’est que mon quatrième jour. Mais pour tout vous dire, je ne suis pas très à l’aise ici. Trop grand, trop moderne, peut-être…

J’aurais en fait pu partir pour un village de pêcheurs plus tôt mais je voulais absolument attendre de pouvoir rencontrer Florian Stammler de l’Université Lapin Yliopisto et Viktor Geyorgevitch Schtro, directeur de l’Institut d’étude de la faune et la flore du Yamal. L’un était encore en Finlande et l’autre était dans la toundra…

Florian Stammler travaille sur les populations Nenets de la péninsule de Yamal depuis près de quinze ans maintenant. Viktor, quant à lui, est né dans la région, dans le minuscule village de pêcheurs de Puyeko.

Comme les rencontres sont simples ici. Hier nous avons tout simplement été chercher Florian à l’aéroport avec Ludmila, chargée de recherche au musée de Salekhard. Une demi-heure plus tard nous sommes tous dans ma chambre où vient nous rejoindre Olga Moshkhalo présidente de RAIPON, une importante association de peuples du Nord. Puis, dans la nuit, longue discussion avec Florian sur le Yamal dont je vous ferai part jour après jour.

Changement de décor pour aller voir Viktor, qui ne travaille pas à Salekhard mais dans la petite ville de Lubytnagyi à une quinzaine de kilomètres vers le nord. Route magnifique, nous passons devant l’aéroport, ultra-moderne. La surprise, une fois de plus, de voir une immense affiche annonçant : « Cela sera notre ville ! » La vue d’artiste montre une ville qui me fait penser aux projets de développement de villes comme Miami. Un peu surréaliste.

Nous passons une fois de plus le Cercle Polaire Arctique qui croise la route qui va de Salekhard à l’aéroport. Je ne l’avais jamais passé autant de fois en si peu de temps !

Pour rejoindre Lubytnagyi nous devons aussi traverser l’Ob. Pas de pont, le projet traîne depuis des années, dix ans peut-être. Ce qui ne gêne pas grand monde en hiver car il suffit de prendre la route de glace qui la traverse. Deux kilomètres. Deux bandes magnifiquement tracées, larges chacune d’une centaine de mètres. Quelques recommandations : vingt kilomètres heure maximum, respecter une distance suffisante entre deux voitures et pas de camion de plus de vingt tonnes.

La route sera ouverte jusqu’en mai. Les autorités la fermeront avant que la glace ne puisse plus supporter le poids des voitures. En fait, c’est l’eau venant du sud et qui va peu à peu submerger la glace qui empêchera en premier les automobilistes de passer d’une rive à l’autre. En été, les voitures franchissent l’Ob sur un bac.

A Lubytnagyi, nous ne sommes qu’à quelques kilomètres de Salekhard. J’ai pourtant l’impression d’avoir changé de région. Je retrouve le Nord auquel je suis habitué. Romantique, déglingué… de vieilles maisons en bois, des tuyaux de chauffages crevés, des conteneurs un peu partout, des carcasses de voitures emprisonnées par la neige. Dans quelques années, le visage de Lubytnagyi n’aura plus rien à voir : un programme de modernisation est en cours. Ces vieilles maisons de bois n’en n’ont plus que pour quelques années.

Ma vision du Nord, je le sais, a quelque chose de ridicule. Ce à quoi aspire la majorité des habitants de la région est plus de confort, plus de travail et de meilleurs salaires. Ils seront peu à regretter leurs vieilles maisons parfois chancelantes et s’installeront avec joie dans de petits immeubles flambant neufs.

D’autre part, si l’on peut trouver une certaine gueule à ces petits villages en hiver, la situation n’est pas la même en été quand la neige a disparu et laisse apparaître des monceaux d’ordures ou des centaines d’objets divers abandonnés au cours de l’hiver et des années.

Mais malgré tout, égoïstement, je l’avoue, c’est bien dans cette ambiance que je me sens le mieux…

Conversation passionnante avec Viktor Geyorgevitch Schtro que je vous raconterai demain… Il est tard et j’ai encore pas mal de boulot avec Pasha pour organiser les prochaines étapes du voyage. Je dois, dans la deuxième quinzaine d’avril, rejoindre une brigade Dolgane très au Nord, vers 74 degrés Nord. A priori en hélicoptère. Huit heures de vol. Environ vingt mille dollars ! Que je suis loin d’avoir…

Légendes photo :

Encore deux ou trois mois avant que ce bateau, figé par l’hiver, retourne naviguer sur l’Ob à laquelle il tourne le dos.

 

Une photo sans grand intérêt. Mais qui montre que le Nord n’est pas forcément que celui que l’on imagine. Ici, à Salekhard, nous sommes dans une vraie ville. Et existe-t-il une ville au monde qui n’ait pas ses graffitis ?

 

Lénine impassible, devant l’un des bâtiments de l’administration. Pasha, en cherchant un numéro dans l’annuaire m’a dit, sidéré, que le nombre d’administrations était incroyable.

Des couleurs, des couleurs… qui remontent le moral pendant le long hiver polaire et compensent l’absence de fleurs.

 

Valentina Lipatova en pleine explication dans l’une des salles du musée.

 

Un marché couvert de Salekhard. Les prix sont monstrueux : au moins deux fois plus élevés qu’à Moscou et quatre fois plus que dans les autres villes du Nord où l’industrie du gaz n’est pas présente ! Comme vient de me dire Pasha à qui je demande de me confirmer les prix : Spassiba neft ! Merci le pétrole !

 

A l’arrêt de bus.

 

Florian Stammler et Ludmila Lipatova dans notre chambre. Florian est en train de lui expliquer le fonctionnement d’un dictaphone. Dans deux jours ils partent poursuivre un travail anthropologique sur la présence humaine dans le Nord.

 

Une ville moderne, je vous dis ! Comme chez nous, ils ont leur pub pour l’ADSL !

 

Le Poutine du jour. Accroché dans le petit restaurant de l’hôtel.

Kraï de Krasnoïarsk, Russie, 648581

Moscou, Russie

Russie

Naryan-Mar, Nénétsie, Russie

Salekhard, Iamalie, Russie

Yar-Sale, Iamalie, Russie

Khatanga, Kraï de Krasnoïarsk, Russie

Russie, 647471

Norilsk, Kraï de Krasnoïarsk, Russie

Observatoire Photographique des Pôles

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